Les zones humides artificielles, ou Constructed Wetlands, sont largement utilisées pour dépolluer les eaux usées domestiques. Cette technique repose notamment sur la capacité des plantes, comme le roseau, à absorber et stocker dans leurs tissus des polluants organiques persistants (POP). Problème : chaque année, des tonnes de biomasse végétale contaminée sont récoltées, devenant un déchet encombrant sans solution de valorisation durable.
Dans une étude publiée dans Nature Communications, une équipe internationale impliquant Claire Villette, Julie Zumsteg et Dimitri Heintz (IBMP-IPHC) a mis au point une approche innovante permettant de recycler ces résidus végétaux pollués en fertilisants liquides riches en composés bénéfiques pour les plantes.
En fermentant des tissus de roseau ou d’ortie contaminés, les chercheurs ont observé une élimination spectaculaire de 87 à 95 % des POP. Ce processus s’appuie sur l’activité coordonnée de consortiums microbiens spécifiques (bactéries et champignons), capables à la fois de dégrader la cellulose des plantes — libérant ainsi les polluants — et de transformer ces composés toxiques en sous-produits inoffensifs ou bénéfiques.
Les fertilisants obtenus ne se contentent pas d’être dépollués : appliqués sur des plants de tomate exposés à un champignon pathogène majeur, Rhizoctonia solani, ils améliorent la croissance et réduisent la gravité des symptômes. L’effet bénéfique semble provenir autant de la stimulation des défenses naturelles des plantes que d’une action antimicrobienne directe exercée par les communautés microbiennes présentes dans le fertilisant.
Cette découverte ouvre la voie à une gestion circulaire des déchets issus des zones humides artificielles : plutôt que d’accumuler ou brûler ces résidus, ils pourraient devenir une ressource précieuse pour l’agriculture durable et l’entretien des espaces verts urbains.